Véritable voyage dans l’imaginaire, ce roman possède peu de comparables en littérature québécoise. C’est une bonne brique, oui, mais le sujet mérite un tel déploiement et permet une réelle plongée dans le fabuleux univers maritime de l’ile d’Ys.
Au début du livre, une carte géographique
des lieux fictifs et une ligne temporelle annoncent la profonde originalité de
l’univers du roman ainsi que sa cohérence. Certains lecteurs pourraient être au
premier abord désemparés par cette plongée dans l’inconnu, mais il faut
accepter de se laisser guider par le récit, comme on se laisse porter par les
vagues de la mer. Et on finit par comprendre, reconnaître et s’habituer aux
références du texte.
Si on annonce dès le début que le récit
vise à reconstituer la vie de Danaé Poussin, c’est tout le fonctionnement de la
société yssoise de cette époque (fin du XVIIIe siècle ?) qui est finalement
décrite. Car les personnages s’accumulent tout au long du livre, dans une
galerie riche et impressionnante qui révèle toutes les tensions qui existent
entre les habitants privilégiés, qui vivent à l’abri derrière les murs de la
cité, et les autres, qui doivent survivre sur les rivages inhospitaliers de
l’île.
La maîtrise du métalangage maritime de
Scali est hallucinante. Les descriptions des navires, des manœuvres maritimes
et de la mer reflètent un travail de recherche colossal et une connaissance
pointue du sujet abordé par l’autrice. Si j’ai souligné souvent des termes dont
la signification m’échappait (tillac, lamanage, caboteur, tourmentin, foc,
lof…), il ne faut pas voir ce vocabulaire comme un obstacle à la lecture, mais
comme un élément essentiel au décor. La mer est un des sujets principaux du
roman, on en découvre toute la beauté, mais aussi toute la fureur. La mer donne
beaucoup aux pêcheurs, mais elle prend souvent aussi aux familles vulnérables.
Le premier opus de Scali, À la recherche
de New Babylon (2015), un roman-western, mérite lui aussi le détour si vous ne
l’avez pas déjà lu. Et c’est certainement une autrice que je suivrai dans les
prochaines années.
Les marins ne savent pas nager (2022) – Dominique Scali - La Peuplade - 708 pages
Le livre est aussi disponible en deux tomes, chez Folio
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